Que les choses soient claires >>>
Les révélations concernant les actes délictueux et criminels de l’abbé Pierre vont bon train.
1/ Le pape affirme savoir que l’abbé Pierre était un grand pécheur. Il est malheureux de constater que les dignitaires de l’Église catholique résistent encore à appeler « un chat, un chat ». Les agissements de l’abbé Pierre à l’égard de nombreuses femmes et de nombreux enfants ne sont, ni plus ni moins, que criminels. Que l’auteur de ces faits soit vivant ou mort ne change rien à l’affaire… Il s’agit de crimes qui ne seront jamais jugés par la justice française puisque le criminel concerné est mort le 22 janvier 2007.
2/ À la fin d’une messe en septembre 2024, le curé de mon village a souhaité rappeler les paroles du pape à propos de l’abbé Pierre. Il a terminé son propos en citant un dicton populaire qui dit : « Que du bien des morts ! » (De mortuis nihil nisi bonum). Certes, je peux entendre qu’il soit inconvenant de dire du mal des morts, mais il est odieux de commencer le moindre propos à ce sujet sans exprimer toutes les compassions du monde pour les victimes de ce prédateur sexuel. Pas un mot à leur égard. Ahurissant ! Situation révélatrice d’un cléricalisme dédaigneux.
3/ La fondation Abbé Pierre et les centres Emmaüs ont rapidement, pleinement et intelligemment réagi. Qu’ils soient félicités et remerciés. Ceci dit, on est en droit d’attendre des institutions religieuses catholiques au moins trois choses : a) Reconnaître les faits et faire preuve de courage pour instruire un procès-verbal historique : qui, quand, quoi, où… b) Poser un acte symbolique communautaire à l’instar de ce que les évêques savent très bien faire lorsqu’une église est souillée, profanée, dégradée… c) Indemniser les victimes, d’une manière ou d’une autre, à la hauteur du préjudice subi.
4/ Si le point précédent est de l’ordre du court ou moyen terme, voici mon point de vue quant au long terme :
– Les collectivités, à plus ou moins brèves échéances, se doivent de faire disparaître les références à l’abbé Pierre de notre environnement et patrimoine communs et ceci, quelles qu’elles soient. Il s’agit d’une question morale. Il y a des conduites exemplaires à suivre et d’autres pas.
– Les œuvres, devenues publiques, se détachent de leurs auteurs initiaux. Elles sont d’ailleurs appelées à évoluer en fonction du temps et de l’espace. Il serait absurde de les brûler sur l’autel de la vindicte populaire. « Là où l’on brûle les livres, on finit par brûler des hommes. » (Heinrich Heine, « Les dieux en exil », 1853).
– Il revient à chacun de décider, en conscience, ce qu’il convient de faire concernant l’homme au travers d’un livre, d’un article, d’un film, d’un reportage, d’un dessin, d’une affiche… Il s’agit d’une question d’éthique.
Personnellement, je continuerai à m’intéresser aux actions bienveillantes de cet homme à l’égard des plus démunis en ayant, sans cesse, une pensée pleine de respect pour les victimes de cet homme perclus de pulsions malveillantes.
Pmg, le 15 septembre 2024
Il y a 70 ans, l’abbé Pierre lançait un appel à une « insurrection de la bonté »
Une appel historique en 1954
Il y a 70 ans, l’abbé Pierre lançait un appel à une « insurrection de la bonté »
L’occasion de voir le film « L’Abbé Pierre – Une vie de combats » (en salle depuis le 08 novembre) réalisé par Frédéric Tellier avec Benjamin Lavernhe, Emmanuelle Bercot, etc.
Né dans une famille aisée, Henri Grouès a été à la fois résistant, député, défenseur des sans-abris, révolutionnaire et iconoclaste. Des bancs de l’Assemblée Nationale aux bidonvilles de la banlieue parisienne, son engagement auprès des plus faibles lui a valu une renommée internationale. La création d’Emmaüs et le raz de marée de son inoubliable appel de l’hiver 54 ont fait de lui une icône. Pourtant, chaque jour, il a douté de son action. Ses fragilités, ses souffrances, sa vie intime à peine crédibles sont restées inconnues du grand public. Révolté par la misère et les injustices, souvent critiqué, parfois trahi, Henri Grouès a eu mille vies et a mené mille combats. Il a marqué l’Histoire sous le nom qu’il s’était choisi : l’Abbé Pierre.
Affiche du film